Bilan de la pandémie sur le loyer au Québec

Bilan de la pandémie sur le loyer au Québec

Bilan de la pandémie sur le loyer au Québec

Il s’en est dit des choses sur le logement québécois durant cette crise de Covid-19. Ce fut effectivement une période ponctuée de craintes, de surprises et d’attentes… C’est bien normal puisque nous faisions face à l’inconnu. Par chance, on a évité le pire à bien des égards. L’immobilier locatif est resté solide et a même connu un essor en région. Cette pandémie a effectivement poussé bon nombre de locataires à revoir leurs priorités en matière d’habitation. Voyons quel en a été l’impact sur le loyer au Québec.

l’île de Montréal : berceau du locatif

Montréal, c’est environ 500 k ménages locataires, soit près du tiers de la totalité de la province (1,4 million). Notre grande métropole, comme la plupart des grandes villes du monde, est l’endroit au pays où les immigrants déposent en premier lieu leurs valises.

C’est donc sans aucun doute que la fermeture des frontières est venue fragiliser l’économie montréalaise et par conséquent, le logement. Ajoutons à cela les étudiants non présents, un lifestyle inexistant, un désir d’accéder à la propriété plus fort que jamais et un appel aux régions & vastes espaces verts. Disons que les locateurs pouvaient bien se demander si ça allait effectivement bien aller.

Pour bien illustrer le portrait de cette situation, voici l’incidence sur le poids de l’offre montréalaise, de la ville de Québec et d’un échantillon de 4 grandes villes “LLLT” (constitué de Laval, Longueuil, Lévis et Trois-Rivières) sur l’offre globale de logements dans la province depuis le 1er janvier 2019

Dans ce graphique, on y aperçoit la hausse fulgurante de la part de Montréal sur l’offre totale de logements depuis le début de la pandémie. À l’heure actuelle, plus de 1 logement offert sur 2 au Québec provient dorénavant de l’île. Ce phénomène vient corroborer un exode plus marqué depuis le début de la pandémie. 

En fait, Montréal a connu en 2020, son plus grand déficit migratoire interne (-1,89% de la population montréalaise), jamais enregistré. Et on collige cette statistique depuis près de 20 ans tout de même. C’est sans surprise que bon nombre de ces départs l’ont été au profit d’autres régions comme la Montérégie, Lanaudière, Laval et les Laurentides. Notons ici que Laval, tout comme les 4 autres plus grandes villes du Québec (Montréal, Québec, Gatineau et Longueuil), a enregistré aussi un déficit migratoire.

Nous avions perçu et étudié cette première grande vague de déménagement à Montréal en 2020 dans cet article. De plus, nous appréhendions une 2e phase en 2021 alors que plusieurs ménages montréalais ont “repoussés” leur désir de déménager et avaient tout de même signé un renouvellement. En effet, ça semble s’être concrétisé cette année, comme en témoigne le graphique ci-haut.

Concernant la ville de Québec, l’offre accrue de logements persiste en 2021. Les pointes observées viennent d’habitude se raffermir au fil du temps, mais restent actuellement plus élevées. Notez ici qu’à Québec, les propriétaires semblent plus disciplinés et offrent rapidement les logements au marché en vue de la location au premier juillet. Ceci expliquerait pourquoi nous observons des pointes d’offre en début d’année comparativement à Montréal, où les pointes s’étendent jusqu’en mai normalement. 

Pour notre quatuor LLLT, on observe une baisse progressive depuis les sommets enregistrés en début de 2019. Si nous prenons le premier janvier des 3 dernières années seulement, nous observons une baisse annuelle moyenne de 36,47% de l’offre de logement. C’est un signe que les taux d’inoccupation continuent de se raffermir, mais que le manque d’inventaire dans les principaux centres urbains attire de plus en plus de développeurs immobiliers. 

 

Une année record pour les mises en chantier “locatives”

Depuis 2015, une hausse marquée de projets de développement immobilier à vocation locative peut être observée dans la province, et plus précisément dans la métropole. Cependant, avec le resserrement des règles en matière de nouveau projet à Montréal (la fameuse loi "20-20-20" par exemple) et la hausse des coûts d’entrée (terrain, développement), les développeurs sont devenus plus réticents à investir dans la grande ville. 

La pandémie est venue quelque peu accentuer ce sentiment dû à l’exode et à la difficulté qu’ont connue les logements plus dispendieux à trouver preneur sur le marché de la location. Cependant, la crise a aussi augmenté drastiquement l’attrait des régions à cause du télétravail et du pouvoir d’achat (baisse des taux d’intérêt, réduction des dépenses non essentielles, etc.).

Ceci a eu pour effet d’accroître le développement de villes situées un peu plus en région. Ce phénomène encourage également les développeurs, puisqu’un manque d’inventaire est omniprésent, surtout face à ce mouvement migratoire accentué. 

Conséquemment, les mises en chantier ont atteint un sommet en 2020 comparativement aux 17 dernières années, avec 54 k habitations. Ce qui est encore plus révélateur, c’est la performance du segment locatif en 2020 : “C’est surtout le segment locatif qui a donné le ton, avec plus de 28 500 logements entamés. Il s’agit d’une croissance de 16 % par rapport à 2019, et d’un sommet pour la construction locative au Québec depuis 1987.- Source : APCHQ, Bilan 2020.

L’ensemble de ces projets de développement immobilier auront vraisemblablement un impact sur les volumes de logements disponibles et les loyers de plusieurs villes. Est-ce qu’on assiste actuellement à un mouvement entraînant une pression à la baisse soutenue de l’importance de Montréal dans l’offre locative totale pour les années à venir ?

 

Encore des doutes sur l’influence de Montréal ?

Ci-bas, nous pouvons observer l’évolution du volume d’offres pour la province, pour Montréal et pour la vieille capitale. Ce qui est intéressant ici, c’est surtout la synchronisation de la courbe de Montréal et de la province depuis le mois d’avril 2020. On dénote également que la ville de Québec semble elle aussi plus synchronisée avec la province depuis le début de 2021.

Nous observons cette année un sommet de logement offert au Québec similaire à celui du début de l’année 2019. Cependant, Montréal et la ville de Québec ont toutes deux enregistré des sommets plus prononcés pour la même période, ce qui laisse présager que l’offre pour le reste de la province est beaucoup plus faible cette année comparativement à 2019.

Et les loyers dans tout ça ?

Ici, nous mettons en parallèle les loyers observés des appartements (toujours hors condo locatif) pour Montréal, pour la province en entier, et pour la portion du Québec n’incluant pas les 2 plus grandes villes. Voici les résultats :

Alors que nous observions une hausse prononcée du loyer marchand moyen en 2019, cette tendance s’est inversée depuis le début de la pandémie en 2020. Par contre, nous assistons à une remontée du loyer marchand montréalais cette année. Adossée à l’augmentation de l’offre de la grande ville, il s’agit vraisemblablement d’un signe qu’un plus grand nombre de logements plus dispendieux ont de la difficulté à trouver preneur. Ceci pourrait donc corroborer l’argument d’une 2e vague d’exode plus importante, telle qu’abordée plus haut.

Pour ce qui est des 2 autres zones à l’étude dans le graphique ci-haut, nous avons observé des tendances contraires à celle de la métropole durant la pandémie. En effet, nous avons ici une hausse soutenue des prix, qui s’est poursuivie en 2021. Il faut cependant mentionner que la hausse du loyer au Québec est attribuable en majeure partie à l’influence beaucoup plus grande de Montréal sur les prix.

 

Au final…

Au moment d’écrire ces lignes, on ne peut qu’être heureux d’entrevoir une ouverture de nos frontières. C’est définitivement ce dont a besoin notre métropole pour atténuer un exode grandissant et prédominant. L’administration actuelle et les suivantes devront tout mettre en œuvre afin de redorer la ville et y recréer un sentiment d’appartenance. 

Sinon, il est très clair que l’engouement pour les régions est là pour rester. Si plusieurs villes ont eu du mal à attirer de nouveaux ménages dans les dernières années, bon nombre se sont bien rattrapées. Les investissements dans le locatif, via les mises en chantier qui se sont accentuées partout en province, viennent témoigner de cet engouement et du désir de sortir des grands centres. Et pour le loyer ? Ne pensez pas que ce dernier sera au prix d’aubaine en région !

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Afin de prendre une décision plus éclairée, il est bien important d’étudier en détail les besoins du secteur, la rentabilité du produit et la réactivité de la demande face au bien proposé. C’est exactement le type d’analyse que nous offrons avec le Centre Technique de Recherche sur le Logement. N’hésitez donc pas à nous écrire, ou même à consulter Zipplex pour connaître les prix et les volumes d’offres de votre secteur.

Retour des loyers gratuits à Montréal

Retour des loyers gratuits à Montréal

Nos statistiques sur la location révèlent une envolée drastique du nombre de logements offerts sur le marché dans les derniers mois. Cette situation est inévitablement annonciatrice d’une augmentation des taux d’inoccupation, puisque tout indique que la demande a du mal à absorber ce flux accru de disponibilité.

Si l’ensemble des RMR québécoises en subissent quelque peu les conséquences, c’est surtout l’Île de Montréal qui en est principalement affectée. Le retour actuel d’offres de loyers gratuits pour promouvoir la location de certaines unités devrait pour conséquent s’accélérer.

C’est tout un contraste avec la situation qui prévalait avant la pandémie, alors que nous étions bien en deçà du taux d’équilibre d’inoccupation de 3% dans la métropole.

Concrètement, si nous comparons les données du 2e trimestre des 3 dernières années, ce que nous avons recensé pour 2020 révèle un surplus de près de 17 800 logements mis en marché au Québec. De ce lot, Montréal cumule à elle seule, 71% des unités affichées, soit environ 12 650 appartements. Si nous faisons abstraction de la grande ville et celle de Québec, pour le reste de la province c’est plutôt un recul de 1 200 biens offerts que nous avons enregistré. 

Notons également que la proportion de l’offre provenant de la métropole face à la province est bien au-dessus de ce que nous observons normalement. Si cette proportion est généralement de l’ordre d’environ 40% face à l’offre totale du Québec, elle a culminé vers un sommet en juin dernier, pour atteindre 56% tel que présenté dans le graphique ci-haut. 

Qu’est-ce qui a engendré cette soudaine abondance de logement au Québec, et plus particulièrement à Montréal ? Examinons les 3 principaux facteurs que nous avons déterminés et qui viennent freiner la demande de logements.

Exode urbain : un phénomène qui prend de l’ampleur

Le phénomène n’est pas nouveau à Montréal. La ville enregistre des pertes nettes à son bilan migratoire interrégional depuis 2007. Mais la perte de 27 890 résidents enregistrée en 2018-2019 est la plus importante depuis 1992. L’année 2020 détrônera indéniablement cette marque, due entre autres, à la popularité du télétravail et au besoin actuel et généralisé de s’évader des grands centres. 

D’ailleurs, dans un sondage réalisé du 14 au 21 juillet 2020, la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) dénote que 73% des répondants-commerçants envisagent l’intégration d’un modèle de travail hybride, combinant donc la présence physique dans les lieux de travail avec le travail à distance.

De plus, 30% des répondants de ce même sondage envisagent la réduction de la superficie de leurs espaces de bureau, ce qui aura assurément un impact pour l’immobilier commercial, déjà passablement secoué par la crise en ce moment.

Par conséquent, une réduction des espaces de bureaux occupés entraînera directement une baisse du nombre d’employés résidant dans la grande ville, ce qui nous ramène à nouveau vers un mouvement d’exode des citadins.

La fermeture des frontières

Nous ressentons déjà les effets de l’exode cité plus haut sur la démographie et l’économie montréalaise. Sans voyageurs et nouveaux arrivants qui viennent contribuer de façon significative à la vitalité de la ville, les répercussions ont également leurs conséquences sur l’ensemble du parc locatif de la métropole. 

Entre 2011 et 2016, le solde migratoire international net se situait à 155 498, alors que la population n’a augmenté que de 50 495 personnes. L’immigration est sans contredit le principal vecteur de la croissance de Montréal, qui est de loin la terre d’accueil principale pour les immigrants de la province. Notons que 58% des nouveaux résidents admis au Québec entre 2013 et 2017 y habitent toujours et sont pour la plupart locataires.

Un dur coup pour la location à court terme

Le surplus de l’offre actuel est aussi lié en bonne partie à la montée en flèche d’appartements fournissant complètement ou partiellement du mobilier. Pour Montréal et Québec, cette proportion est actuellement de l’ordre de 1 logement meublé offert sur 4. Généralement, nous sommes dans une composition variant de 16 à 18% pour ces marchés. 

Nous avions déjà observé une hausse importante du nombre d’appartements meublés offerts en début de pandémie et celle-ci a nettement progressé durant le second trimestre. Selon nos estimations, c’est plus de 6000 unités supplémentaires qui se sont ajoutées à l’éventail de logements.

Cet accroissement provient principalement du retour à la location à long terme de logements de type Airbnb et des locations corporatives non renouvelées par les entreprises internationales. 

La chute des taux d’intérêt

Tout comme ce fut le cas dans les dernières années, il était difficile de se trouver un logement au Québec au début des années 2000. Ce qui a largement contribué à la remontée d’unités disponible à la location fut le repli des taux d’intérêt.

Dans un tel scénario, la capacité d’emprunt des ménages augmente et favorise l’accès à la propriété. À ce niveau, les ventes de maisons de type unifamiliales ont explosé au Québec en juin et juillet dernier avec des hausses notables de l’ordre de 44% et 56% respectivement. La pause forcée de l’immobilier en mars et avril n’y est pas indifférente et est venue contribuer évidemment à cette augmentation. Mais en considérant le sommet d’appartement offert atteint durant les 2 premières semaines de juin (11 600 logements), les bas taux d’intérêt appliquent inévitablement une pression sur la location. Notons tout de même que la progression des ventes a été plus forte en région confirmant à nouveau le mouvement d’exode urbain.

La pression exercée par l’exode urbain, la fermeture des frontières et la baisse des taux d’emprunt affectent une grande proportion d’unités mise en location dans les grands centres du Québec, mais surtout à Montréal. Si pour le moment les loyers se maintiennent toujours, il y aura lieu plus que jamais pour plusieurs propriétaires, d’user de créativité afin d’assurer une mise en marché efficace de leurs logements. Sans aucun doute, les loyers gratuits et autres incitatifs pour louer feront partie intégrante du paysage locatif montréalais dans les prochains mois.

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