Le rapport sur le marché locatif de la SCHL publié récemment a suscité l’attention des médias, notamment en raison de la baisse des taux d’inoccupation et de l’augmentation des loyers. L’opposition officielle en matière d’habitation en a profité pour critiquer le gouvernement pour son inaction face à la crise. Cette dernière a proposé des solutions, telle que la transformation des immeubles à bureaux en logements locatifs. Selon nous, s’attarder à ce type de transformation comporte son lot de défi et ne serait ultimement pas suffisant. D’autres initiatives seraient plus adéquates afin de régler la crise du logement au Québec.
Nous proposons ici le principe du libre marché. Ceci devrait s’appliquer autant aux propriétaires, aux locataires et qu’aux divers paliers de gouvernements. L’objectif est d’encourager tous les participants à être dynamiques et à chercher constamment à améliorer leur situation. Bien entendu, pour que cela se produise, il faut un inventaire suffisant d’unité disponible. Cependant, les réglementations et les limites nuisent au dynamisme du marché et découragent la création de logements.
Également, l’encadrement rigide des loyers crée une distorsion majeure et grandissante entre les loyers marchands et ceux dans les baux. Rien pour encourager les propriétaires et développeurs à entretenir et à créer des unités. Quant à eux, les locataires s’accrochent à leur logement devenu un rabais face à ce qui est offert, même si ce dernier ne correspond plus à leur besoin. C’est pourquoi les instances publiques devront compenser le peu de logements disponibles et cesser de croire à tort que plus de règles viendront à bout de cette crise.
Un sentiment d’injustice
Il peut être décourageant pour un locataire de constater que son nouvel appartement coûte considérablement plus cher que celui d’un voisin vivant dans le même immeuble, même si celui-ci y est depuis 10 ans. Le problème réside dans un système qui promeut de trop faibles hausses de loyer face à la hausse du coût de la vie. N’ayant pas suivi le marché, une distorsion se creuse ainsi entre la valeur marchande et la valeur contractuelle des loyers.
Comme mentionné plus haut, avec des loyers progressant à deux vitesses, certains occupants de longue date ne peuvent justifier la nécessité de bouger. Même si maintenant ils sont sans enfant ou sans conjoint, l’effet de ruissellement (qui serait une normalité) est freiné par la simple notion de prix, puisqu’il en coûterait plus cher ailleurs. De ce fait, les familles avec de réels besoins ne pourront pas profiter du logement, même s’il est mieux adapté pour accueillir une famille qu’un ménage d’une ou deux personnes.
D’ailleurs, le taux de rotation est en baisse actuellement au Québec, et plus particulièrement dans les grands centres comme Montréal. De notre côté, nous observons une diminution notable de la disponibilité des logements. Nous avons d’ailleurs produit un rapport à cet effet, disponible dans la bibliothèque de notre application web.
L’encadrement rigide des loyers y est pour quelque chose, puisqu’il décourage le maintien de la valeur au marché des unités. Prenez par exemple les immeubles ayant été construits entre 1980 et 1999. Nous avons fait l’exercice de prendre leur loyer selon la SCHL et de les augmenter selon l’IPC québécois jusqu’en 2020. Si l’on compare le loyer obtenu avec le loyer moyen selon la SCHL pour cette même année et pour ces mêmes immeubles, le prix basé sur l’IPC est 13,70 % plus élevé que celui moyen observé.
Les promoteurs, eux ?
Dans un environnement inflationniste comme celui que nous avons connu, cette distorsion s’est exacerbée grandement. Il était malheureusement inévitable que quelque chose cède au niveau du logement. Ceux qui sont à la recherche d’un appartement doivent accorder un budget encore beaucoup plus élevé pour louer.
De surcroît, les promoteurs et les constructeurs se voient imposer où, quand, comment et à quel prix ils doivent construire. À Montréal, il y a eu des exigences de type 20/20/20, une taxe pour le REM, et maintenant le droit de préemption. Ceci contribue encore une fois au déséquilibre dans lequel les projets doivent être menés. Dans ce contexte, les promoteurs ont tendance à privilégier l’abordabilité, le grand luxe ou une superficie beaucoup plus limitée. Il y a peu, voir, pas de choix intermédiaires, surtout lorsqu’il est question d’accueillir des familles. Cette situation est inacceptable et nécessite une approche favorisant un meilleur équilibre.
Face à un nombre grandissant de restrictions, ceux qui bâtissent le logement ne sont plus encouragé à le faire. Sommes-nous surpris que, comme ce fût le cas de l’Hippodrome, il n’y ait pas eu de promoteur intéressé ? Une tentative d’imposer des normes d’abordabilité, d’écoresponsabilité et d’accessibilité n’a certainement pas aidé. Jumelé à un manque de vision, personne n’a voulu prendre en charge ce projet phare de la Ville de Montréal.
La vraie crise en vue
Si l’on pouvait s’affranchir de certaines exigences, l’attribution de qui paie quoi serait davantage basée sur l’offre et la demande. Ceci favoriserait une dynamique avantageuse pour le logement. Les promoteurs auraient une plus grande flexibilité face aux logements qu’ils construiront. Bref, tout comme l’expérience de remplir un bocal de sable avant d’y ajouter des cailloux et des roches, ajouter des exigences et des règles ne permettra pas de pleinement combler le déficit. Ceci vient à l’encontre du principe de ruissellement et ne profite à personne, favorisant même une crise encore plus grande. Tout cela à l’heure où nos gouvernements ont de grands objectifs liés à l’immigration.
Sur une note positive, à Québec, la nouvelle ministre du logement est actuellement à la recherche de solutions novatrices pour les enjeux du milieu locatif. On y passerait en revue diverses recommandations pour apporter des solutions efficaces en matière d’habitation. Également, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec (CORPIQ) mène un sondage ouvert à tous afin d’obtenir les recommandations des propriétaires en matières législatives. La volonté de trouver des solutions n’a jamais été aussi forte. Par contre, il est primordial d’alléger le processus de création de logement, et de travailler de pair avec les promoteurs.